mardi 30 juin 2009

Que d'émotions

Il n'y a pas à dire, Wikipédia c'est prenant. On vient pour écrire des articles (ou corriger les milliards d'erreurs qui s'y trouvent), et on finit par mépriser copieusement des gens qu'on ne connaît pas, s'énerver sur des trucs complètement anodins, claquer des portes virtuelles, voire bouder. On entre en résistance, on sabote symboliquement les votes et élections.

On crée des sites webs ou blogs pour dire tout le mal qu'on pense d'un truc qu'il suffirait d'ignorer, comme on ignore souverainement une voisine bruyante dans la cage d'escaliers. On triche et on ment pour continuer à écrire sur le catch, la guerre (toutes les guerres), Dieu et les chicons. On se fait traiter de menteur et de voleur (d'images, de logos). On mène l'enquête et on démasque les menteurs et les voleurs.

On fait pression sur les arbitres, les admins, les autres contributeurs pour sauver ou éliminer un contenu qu'on trouve quasi-gratuitement ailleurs et qui, pour l'essentiel, ne nous est pas plus lié que cela. On donne des leçons de politesse à de plus vieux, plus jeunes, plus instruits. On vexe, et on encaisse les petites vexations. On prend des photos de vacances où on n'est pas dessus, de lieux où il n'y a, objectivement, rien à voir. On souhaite leur anniversaire à des gens qu'on n'a jamais vus.

Ca doit être ça qu'on appelle la force de l'écrit.

lundi 29 juin 2009

Manufacturing Consent

Ceux d'entre vous qui ont vu Manufacturing Consent: Noam Chomsky and the media se souviendront peut-être de cette scène où Chomsky se tient avec deux rouleaux de papier, chacun étant une compilation des articles du New York Times concernant l'invasion du Timor-oriental pour l'un et la domination des Khmers rouges sur le Cambodge pour l'autre. Deux évènements ayant chacun causé la disparition d'au moins 20% de la population locale. En dévidant ces rouleaux, celui concernant le Timor s'arrête rapidement, tandis que celui sur le Cambodge se déroule et se déroule, jusqu'à atteindre une longueur comparativement impressionnante.

L'une des conclusions de Chomsky (que je schématise) est que le traitement de l'information n'est pas tant lié à son importance qu'à l'intérêt qu'elle constitue pour la politique interne du pays: le Cambodge faisait partie de la zone d'action américaine lors du conflit vietnamien, tandis que le Timor restait confiné aux marges de la planète. D'où l'intérêt prononcé pour ce qui se passait en Indochine plutôt qu'aux confins de l'Indonésie. 17 ans plus tard, le même phénomène d'inégalité de traitement est visible sur Wikipédia.

On a récemment eu un très bel exemple de cet état de fait avec l'article sur Neda Agha-Soltan. Visité par un peu plus de 4000 personnes sur la Wikipédia francophone dans les deux premiers jours de son existence, il relate le décès d'une jeune iranienne lors des récentes manifestations consécutives aux élections présidentielles iraniennes. Diffusé sur YouTube, cet assassinat a fait le tour du monde et tout le monde s'est ému du sort de cette pauvre jeune femme. Sauf que, si tant est qu'une semaine de recul permette d'en juger, il s'agit là d'un épiphénomène: le mouvement s'est essouflé assez rapidement après ce tragique incident, et en plus Michael Jackson est mort. L'égérie de la révolution a vécu, si l'on peut dire.

Voyons maintenant le cas de Rodrigo Rosenberg Marzano, avocat guatémaltèque décédé le 10 mai dernier. Celui-ci n'a pas d'article dédié sur Wikipédia en français, ni dans beaucoup d'autres éditions (seulement 4 occurences: :en, :es, :da et :pt, alors que pour Neda on est à 20). Et pourtant, Monsieur Rosenberg a lui aussi sa vidéo sur YouTube. Celle-ci n'est d'ailleurs pas consécutive à quelque émeute mais la cause de manifestations où plusieurs centaines de milliers de citoyens sont descendus dans les rues. La raison? Enregistrée quelques jours avant sa mort, Rosenberg y indique "Si vous regardez cette vidéo, c'est parce que j'ai été assassiné par le Président Alvaro Colon" (et d'expliquer pourquoi). Pas le genre de choses qu'on voit souvent, et pourtant silence radio en Europe.

De manière similaire, le renversement du Président hondurien dimanche matin n'aura attiré que 118 visiteurs pour sa première journée, 800 chez les anglophones; à mettre en perspective avec les 2500 et 24500 visiteurs au premier jour pour Neda Agha-Soltan, encore une fois.

Alors quoi? On voit ici selon moi les limites wikipédiennes: ce ne sont pas les évènements importants qui sont forcément rapportés, mais bel et bien ceux qui touchent l'imaginaire et les intérêts collectifs. L'Iran est une puissance quasi-nucléaire, incontournable sur la scène proche- et moyen-orientale. Ce qui se passe là-bas a, au moins indirectement, des répercussions ici. Le Honduras et le Guatemala, par contraste, ne sont que deux confettis centraméricains que bien des gens auraient du mal à placer sur une carte. On ne m'ôtera pourtant pas de l'idée que l'importance des évènements relatés ci-dessus est autrement plus significative pour le devenir de ces deux pays qu'un décès aléatoire en marge d'une manifestation.

Ce projet qui se veut encyclopédie se conduit donc en fin de compte comme un média; en ce sens Google fait bien de l'intégrer dans son aggrégateur de nouvelles. En privilégiant la rapidité de réaction, on fait pourtant le sacrifice de l'analyse et du tri; les contributeurs (et donc la puissance d'écriture qui fait la force de Wikipédia) sont naturellement dirigés vers l'épiphénomène très médiatique plutôt que vers la réelle valeur ajoutée: Wikipédia, rappelons-nous, doit pourtant beaucoup de sa gloire au fait qu'on y trouve souvent ce qui n'est pas disponible ailleurs.

jeudi 25 juin 2009

Contagion (?)

Je ne sais plus exactement quand un monomaniaque wikipédien (mais non ce n'est pas un pléonasme, certains ont plusieurs manies), que je ne nommerai pas (mais il parait qu'il mousse) me fit remarquer sur IRC (oui oui l'endroit caché où les cabalistes ourdissent des putschs visant à manipuler internet en particulier et le système solaire en général... pour les moins ambitieux d'entre eux) que la catégorie de Commons recensant les « town halls » de mon coin était quasiment vide. Sous entendu (à peine masqué, autant que l'adresse du chan IRC, si j'y repense) : « Hey vieux, t'as du taf ! ». Oui car ce monsieur photographie à gogo les mairies, églises, gares de France ou d'ailleurs. Ça paraît incongru, non ? J'étais naïf à l'époque et ne m'imaginais pas où cela allait me mener. En effet, le ver était dans le fruit et l'idée a fait son chemin, sans que je ne m'en rende compte, je dois le dire.

Il y a quelques mois en week-end avec des amis à travers des chemins de traverse et autres bleds improbables, c'était devenu un running gag : « Town hall, les gars, on s'arrête ! ». Quelques semaines plus tard en Gironde, je me rappelle m'être escrimé (au milieu de mon footing or ce n'est pas facile de faire escrime, footing et photo) à prendre la photo de la mairie de Mérignac. Déjà, car il y a trois bâtiments ! Aucun n'a le drapeau tricolore et la devise républicaine, un arbre du parc cache une partie de la façade, ça m'énerve, je fais comment moi ? Et en même temps, je rigole de « m'énerver » pour ce genre de « soucis ». Je choisis un bâtiment et hop clic clac la photo est faite. C'est toujours mieux que rien après tout.

La semaine dernière, je me suis baladé en famille dans les Alpes. A force d'écumer les différentes vallées, on arpente pas mal de villages. Mon père se prend au jeu des Town halls et n'hésite pas à prendre les mêmes clichés que moi et à me chambrer auprès des tenanciers du gîte où nous étions (en occultant le fait que lui aussi prend des photos, bien entendu). Mais là, à la limite, cela ne me surprenait pas trop. Là où il m'a scié, c'est quand, de retour chez lui, il m'envoie un lien pour télécharger un fichier zippé contenant des photos qu'il a faites. Sur les centaines qu'il a dû transférer sur son disque dur, il ne m'a envoyé que des photos de mairies, j'y crois pas.... Tra-hi je suis ! Ça commence comme ça et puis il va finir un jour oveursaïteur si ça se trouve (la faute à la recrudescence qui augmente, bien entendu).

Car oui la contagion a commencé et si cela se trouve, vous aussi vous allez vous mettre à photographier des MJC de chef-lieu de canton en étant embêté si vous en ratez une (ou si l'éclairage n'est pas bon ou s'il y a une voiture devant la façade ou bien un papy qui ne sort pas du cadre assez vite...), je vous aurais prévenus. Ce qui est rigolo, outre que je suis loin d'avoir tout mis sur Commons, c'est que je n'ai pris aucune des photos des town halls de mon coin... Ou je suis trop feignant pour aller dans les villages à côté ou bien c'est une forme de résistance à la contagion townshallsolâtre.



On trouve des inscriptions rigolotes sur les cols du Tour de France

Pas pu m'en empêcher

Pour info : dans son dernier post, Poulpy critique Pierrot qui est un blogueur reprenant des infos sans rien rajouter, voire pire, en les déformant.

mercredi 24 juin 2009

Inspiration, expiration

On se chicane sur le bulletin des administrateurs. On se critique (ou on se fait critiquer) à propos des arbitrages. Quand on pensait que les demandes de suppression avaient touché le fond depuis longtemps, de nouvelles têtes arrivent avec pelles et pioches et se mettent à creuser.

Il n'est pas inutile, dès lors, de remettre les choses en perspective et se rappeler l'essentiel: 




Il y en a quand même de plus malheureux que nous.

lundi 22 juin 2009

Vu à la télé

Le cadavre de Neda Agha-Soltan‎ (ou Soltani) n'était pas encore froid que, déjà, un article lui était consacré sur Wikipédia. Pour ceux qui ne lise pas les nouvelles, cette dame a été abattue en marge des manifestations du samedi 20 juin à Téhéran, apparemment par un milicien basij.

La différence entre elle et les sept autres morts confirmées des premières journées de manifestation est qu'une voire plusieurs vidéos de son décès ont été montrées sur YouTube1a.

Je regarde d'habitude les créations d'"articles" sur des nouvelles fraîches avec un vague haussement d'épaule désabusé, qu'on y parle de Joe le Plombier, de grippes diverses ou de piratages. En gros, j'ai fait mon deuil de Wikinews comme je l'expliquais il y a peu.

Mais là, probablement parce que j'étais sur place il y a à peine deux mois, cette fascination morbide pour l'actualité me touche un peu plus. Prétendre écrire un article sur cette personne alors qu'on documente simplement son meurtre, c'est faire de la presse à sensation. Autant Joe est un prénom sympa, autant la grippe aviaire ou porcine est un phénomène quelque peu immatériel, autant dans le cas présent on touche au degré zéro du voyeurisme. Quand je vois qu'un des principaux contributeurs à l'article sur :en ajoute ce matin une photo avec comme commentaire "ajout d'image horrible" ("add gore picture"1b dont la source est "Twitter", j'ai franchement envie de gerber.

J'ai visité l'Iran au printemps. Y'a du bien (Ispahan, Shiraz, les musées) et du moins bien (Téhéran, Bushehr, les kebabs comme seule option culinaire). Les gens, autant que j'ai pu le constater, étaient incroyablement accueillants et chaleureux - à l'exception de certains miliciens, qui sont effectivement de sacrés fils de putes endoctrinés (pas d'autre mot). C'est un pays d'intenses contradictions: les billets de banque portent un symbole nucléaire; la télé locale se félicite des pertes enregistrées par les "forces d'occupation de l'entité sioniste" à Gaza; les femmes, en dehors de Téhéran, y sont des citoyen(ne)s de seconde zone. L'esssence est quasi-gratuite (8 centimes d'euro par litre), mais rationnée: ceux qui le peuvent s'achètent donc un deuxième voire troisième véhicule (souvent une Peugeot 206 ou 405) afin d'avoir une deuxième ou troisième carte d'essence...

Mais le pays s'arrête aussi à 20h30 tous les soirs pour regarder un soap opera coréen dont la popularité dépasserait les rêves les plus fous des producteurs de Dallas. Tout le monde regarde CNN sur les antennes-satellite-qui-n'existent-pas; les ados (mâles) s'habillent comme si la tektonik était une philosophie de vie; et on n'entend guère l'appel du muezzin ni ne voit grand-monde à la mosquée que le vendredi midi (sans compter que pour les chiites il n'y a apparemment que trois prières quotidiennes).

Personne là-bas n'est dupe: en avril déjà on nous disait que Khamenei avait, dans l'un de ses discours, annoncé qu'Ahmadinedjad aurait une énorme tâche à accomplir dans les quatre prochaines années. Le résultat de l'élection était plié au moins deux mois en avance. Le président n'était, de fait, jamais vu que comme un histrion: nous étions à Shiraz lorsqu'il a fait son show à Genève et que plusieurs délégations ont quitté la conférence sur le racisme. On a tous bien rigolé en se disant "quel clown!". Qu'on ne s'y trompe pas: le pouvoir là-bas est aux mains des religieux, ainsi que le montre l'iconographie omniprésente dans les rues et sur les bâtiments officiels.

J'avoue du coup que l'explosion actuelle m'a d'autant plus surpris que les gens paraissaient vaguement résignés et beaucoup trop occupés à essayer de joindre les deux bouts. Avant de prendre tout ça au sérieux, j'ai attendu de savoir s'il y avait aussi des manifestations en province (c'est le cas). Mais peut-être qu'en attribuant au vainqueur 63% des voix de manière homogène sur le territoire, le bouchon est allé un peu trop loin.

Quoiqu'il en soit, vouloir en 36h faire d'une morte l'égérie d'un mouvement que peu comprennent montre probablement que la course au sensationnel et à la création d'articles dépasse de loin tout espoir de réflexion, de recul et d'analyse. Les Iraniens, la politique, le fait que ce mouvement ne mènera probablement à rien, on s'en cogne: il faut donner au lecteur ce qu'il veut, coco. Je peux rêver que WP fr: ne tombera pas dans ce piège et essaiera de tirer les choses vers le haut (ne serait-ce qu'en redirigeant l'article ce torchon vers l'article principal), mais j'ai quelque peu passé l'âge de croire au Père Noël. En écrivant ce billet, sans créer de page de suppression, j'ai juste envie de savoir qui seront les charognards.


1a, b: J'ai hésité plusieurs minutes sur le fait d'ajouter un lien ou pas dans ces deux cas, mais finalement non: si vous êtes curieux, sachez qu'on y voit juste une personne mourir.

samedi 20 juin 2009

Bien-pensance

J'ai eu aujourd'hui comme une épiphanie. J'ai identifié l'un des nombreux trucs qui m'embêtent royalement sur Wikipédia en général, et sur le Bulletin des administrateurs en particulier: la bien-pensance.

J'essplique.

Un contributeur lambda (c'est à dire un qui contribue essentiellement aux articles, je ne suis pas là non plus pour défendre les centaines de cas sociaux qui se croient sur usenet) s'agite sur les pages où, structurellement, on a du mal à résister à la tentation de s'agiter - au choix les PàS, AdQ, pages de discussion d'article, etc. etc., soit en gros partout sur WP vu qu'on peut toujours dialoguer par boîtes de résumé interposées et donc trouver matière à s'agiter. Notez bien que je parle ici d'agitation et pas de provocation ou agression ouverte: l'ambiance, pour peu qu'il soit possible d'en juger depuis son écran, est quelque peu tendue mais dans les limites du raisonnable1.

Le contributeur tiers et plein de bonne volonté, devant cet état de fait, est alors confronté à deux choix:
  1. Laisser un mot discret sur une page de discussion personnelle pour signaler qu'on s'approche d'une pente savonneuse et qu'on risque d'être bloqué; ou
  2. Aller sur le bulletin des admins pour signaler le besoin de "calmer les débats" à coups de blocage sur la tête2 et espérer plus ou moins ouvertement que cela sera promptement acté.
Les deux variantes sont bien évidemment pour le bien du projet. Vous ne serez pas non plus surpris d'apprendre que j'ai comme un problème avec la deuxième proposition. En effet, transformer quelqu'un en martyr par le fait du Prince et afin de recadrer une discussion me semble avoir autant de sens que d'espérer la guérison de qui que ce soit à coups de saignées. Le faire sans laisser un mot auparavant pour prévenir la personne me semble, à tout le moins, manquer d'élégance, un point à ne pas négliger lorsque l'on s'apprête à donner une leçon de bienséance.

Le problème de cette deuxième approche est ce petit côté "Jugement de Salomon Zeus": on détermine très arbitrairement ou se trouve la ligne rouge non pas avant, mais après que quelqu'un l'ait franchie. On ne va pas le lui dire à lui, mais à d'autres personnes armées d'un gros baton (ou, si on a soi-même un gros baton, on rend la justice ipso facto).

Le problème que j'ai, avec tout cela, est que la ligne rouge n'est pas déterminée par celui qui serait en droit de se sentir offensé (et qui dès lors pourrait aller en toucher deux mots aux admins, à défaut de le signaler directement à son contradicteur), mais par un tiers non impliqué dans la discussion et qui, à tout le moins, est en train de mettre les pieds dans le plat de manière assez brutale après avoir lu une page de discussion (probablement en diagonale). Le problème que j'ai, avec cette méthode, est que je vois mal comment l'agité ne peut pas se transformer en victime d'un arbitraire. Le problème, enfin, est qu'on a eu plusieurs occurences récentes de ce genre d'attitude3. Je pense pourtant qu'il y a quand même une énorme différence entre la phrase "attention, si tu continues tu vas t'en prendre une" et "tu t'en es pris une parce que tu as continué ce qu'on ne t'avait pas dit d'arrêter".

Ce n'est bien sûr que mon avis, mais je le partage. Si vous trouvez que quelqu'un s'emballe un peu trop, dites-le lui tout de suite. S'il continue, alors oui, parlez en sur le BA (ou intervenez) tout de suite. C'est effectivement moins grisant que de manier la matraque avec célérité, mais probablement plus efficace en ce qui concerne l'ambiance et, plus généralement, le bien du projet mentionné plus haut (et dont tout le monde se fout). Si vous pensez sincèrement que tout le monde peut rester calme et collaboratif en y mettant le nombre nécessaire de blocages, il est peut-être temps de vous demander quel niveau de collaboration on peut réellement obtenir sous la contrainte.



1. Raisonnable: la grande majorité des assertions visant les arguments, même si perçues comme vexantes (ex. "tu racontes n'importes quoi"). Déraisonnable: tout vocabulaire visant directement la personne (ex. "tu es un ignare"). La limite est parfois subtile.
2. Ou pire, signaler qu'on a pris sur soi de "calmer les débats" en tapant sur le plus agité des protagonistes.
3. Je ne vise personne en particulier, l'important n'est pas de pointer du doigt mais d'exposer un problème.

lundi 15 juin 2009

Les admins sont des wikipédiens (presque) comme les autres

Vous aurez sans doute remarqué, à droite de cette page, une section "Sondage" dans laquelle je me permets de poser des questions aléatoires et n'ayant d'autre finalité que de satisfaire une curiosité de passage sur Wikipédia et la façon dont elle se voit (à travers les gens qui me lisent). Je dois en être à une trentaine de questions différentes (avec des taux de réponse tout aussi variés, à lectorat constant) et j'essaierai un jour d'en présenter un petit récapitulatif pour Pierrot. En attendant, si quelque interrogation vous turlupine n'hésitez pas à m'en faire part: j'ai une imagination fertile mais limitée, et me ferait un plaisir de relayer vos questionnements. Fin de la parenthèse introductive.

Il y a quelques temps de cela, je ne sais plus ni trop quand ni pourquoi, j'avais demandé si vous pensiez que les administrateurs constituaient une frange plus conservatrice de Wikipédia - façon polie peut-être de parler de cabale, je n'en sais à vrai dire trop rien, c'était juste une question comme ça qui m'était passée par la tête.

Sur la petite vingtaine de réponses, une grosse majorité (58%) répondit que non, les admins n'étaient pas vraiment plus conservateurs, tandis les autres se répartissant entre oui (23%) et "sur certains sujets seulement" (17%). Il eut été intéressant de savoir qui avait répondu quoi, mais n'ayant pas encore atteint le niveau de sophistication nécessaire je me suis contenté de passer à la question suivante ("le CAr est-il un succès ou échec?") et puis basta.

J'ai récemment décidé de revenir sur le sujet, histoire de voir si l'on pouvait considérer les élections pimentant régulièrement la vie wikipédienne comme faisant partie de ces sujets certains. Et quoi de mieux, pour se lancer dans un nouvel exercice de statistiques fantaisistes, que de se pencher sur la dernière élection au Comité d'Arbitrage? Rien, justement, et c'est pour cela que j'ai sorti papier, stylo, et tableur Excel pour vous parler de ce qui va suivre1.

Je me suis donc penché sur l'élection aux 9 et 10e Comités de mars dernier, scrutin qui aura opposé 14 candidats ma foi très différents, contributeurs chevronnés et nouvelles têtes: quoi de plus naturel comme mesure de conservatisme que de comparer les votes entre ces deux catégories selon que les votants soient admins ou, je n'aime pas ce terme mais il est bien pratique dans le cas précis, peons?

Pour plus de sécurité, j'ai pris sur moi d'éliminer de la liste deux des candidats: Iluvalar et Alvaro, considérant qu'on risquait souvent d'avoir répondu à l'appréciation de leurs personnalités respectives qu'à celle de leur compétence putative pour la fonction d'arbitres. Cela fait, restent alors dans notre échantillon:
A l'issue d'une petite tambouille perso permettant de lisser tout cela, j'ai alors assigné aux valeurs "nouveaux" et "anciens" un point pour chaque vote pour, et retranché un point à chaque vote contre un membre de la catégorie (et zéro pour les votes neutres). En clair, quelqu'un votant contre tous les nouveaux obtiendrait -7, contre tous les anciens aussi, et une personne votant neutre ou pas du tout aurait un beau zéro. Puis j'ai reporté tout ça sur un graphique. En fait deux, parce qu'avec 120 et quelques votants (54 admins, 70 non-admins; mes excuses par avance pour les éventuelles erreurs de positionnement), ça prend de la place:

Votes des peons à gauche, votes des admins à droite. Abscisse: votes pour des anciens; Ordonnée: vote pour des primocandidats.
Cliquez pour agrandir.

Comme indiqué, l'axe gauche-droite indique la propension à voter pour ou contre un candidat connu, et le haut-bas montre l'attitude vis-à-vis des nouveaux candidats. Ce qui me conforte dans mon interprétation, c'est de voir par exemple DarkoNeko tout en haut et que certains de ses commentaires de votes laissent peu de doutes sur son a priori plutôt positif sur l'injection de "sang neuf".

Cela étant dit, les deux graphes sont légèrement différents, à tout le moins en apparence; les votes des admins semblent légèrement moins dispersés: la moyenne se situe à (2.5;0.6), ce qui veut dire en gros qu'ils ont plus facilement apporté leur soutien à des têtes connues que moins (ou pas) connues. Les peons, pour leur part, sont en moyenne à (1.5;1.2): le niveau de soutien accordé aux deux groupes est donc grosso modo comparable.

Si l'on regarde maintenant la médiane (qui divise chaque population en 2 parties égales), celle-ci se trouve aux coordonnées (3;1) pour les administrateurs, et (2;1) pour les autres: les admins, vu sous cet angle, accordent donc à tout le moins plus souvent leur confiance que ne le font l'ensemble des non-admins.

A ce stade, j'ignore encore s'il faut en conclure que cela rend les peons plus conservateurs, mais c'est une nuance que j'ai trouvée intéressante à rapporter. Une autre nuance intéressante se présente lorsque l'on regarde qui "vote avec ses pieds" - c'est-à-dire combien y en a-t-il qui ne se prononcent pas du tout (même pas neutre)2. On voit dans ce cas que si près de 85% des admins se sont prononcés sur tous les candidats, ce score tombe à 70% pour les non-admins - les mauvaises langues pourront dire que les administrateurs ont un avis sur tout, je dirais plutôt pour ma part que l'expérience permet de juger plus facilement d'un candidat ou d'avoir une opinion plus arrêtée sur les "programmes" proposés.

L'un dans l'autre, on voit que la réduction à un système et des stéréotypes de castes n'a pas grand sens: la population wikipédienne est hétérogène, et les choix relèvent plus d'expériences et de valeurs individuelles. Tant pis pour les idées reçues.


1. Mais n'oubliez pas: il y a les mensonges, les gros mensonges, et les statistiques (B.Disraeli).
2. Cette attitude est souvent traduite en Suisse comme un aveu d'incompétence (au sens littéral et sans connotation péjorative) sur le sujet d'une votation, d'où le recours à l'abstention plutôt qu'un vote malavisé.

mardi 9 juin 2009

Traductions

Or doncques, vous avez décidé de traduire un article de la Wikipédia anglophone qu'on ne trouve pas (encore) chez nous. Après tout pourquoi pas, quand on est en panne d'inspiration on ne risque que des bonnes surprises en allant fouiller chez le voisin.

Sauf que traduire, c'est long et compliqué.

Heureusement, Google vient à votre secours (par le biais du très bon quoique non-officiel Google blog) avec son dernier gadget, j'ai nommé le Translator toolkit. Le ton du présent billet est badin mais ne vous y trompez pas, c'est vraiment très, très fort.

J'essplique.

Disons que vous désirez traduire l'article sur le Ve amendement à la Constitution américaine, qui pour une raison qui m'échappe n'est pas disponible dans la langue de Molière: il suffit d'indiquer l'article wikipédien concerné dans la section ad hoc (l'outil marche aussi pour Knol):


Le traducteur fait alors son office et place texte original et traduction côte à côte afin de permettre les corrections nécessaires:

Viennent ensuite les gadgets dans le gadget: la fenêtre qui vous permet d'intégrer des balises HTML (ou wiki) dans le texte; la fonction memory qui, se souvenant d'une autre traduction similaire effectuée ailleurs, vous soumet ces morceaux de texte ayant déjà passé le filtre de la relecture humaine.

Bref, l'idée n'est pas tant d'augmenter la qualité de la traduction (certaines phrases ne veulent toujours rien dire) que de la faciliter. Evidemment, on trouvera toujours des raleurs pour dire que pour l'instant l'interface n'est qu'en anglais, qu'on ne peut traduire que depuis celui-ci et que les modèles passent mal ou pas (ainsi que les liens). M'est avis que cela devrait changer assez rapidement.

Quant à ceux qui se seront déjà essayés à l'exercice au moins une fois, ils auront déjà compris combien de temps ils s'apprêtent à économiser.

jeudi 4 juin 2009

Wikifrime

Vous aimez Wikipédia, mais vous aimez aussi bouquiner sous les couvertures? 

Rob Matthews vous propose l'édition reliée des featured articles disponibles sur la version anglophone: 


En 5'000 pages, avec rien que du bon, ça déchire, un succès assuré pour votre bibliothèque dans le salon, la solution idéale aux pannes d'internet. 

Bon j'ai pas encore trouvé le slogan parfait, mais j'y travaille.

mercredi 3 juin 2009

A quoi sert Wikinews?

La tragique disparition du vol 447 d'Air France dans la nuit de dimanche à lundi pourrait bien avoir fait une 229e victime: Wikinews.

Depuis quatre ans qu'il existe, soyons honnêtes, ce projet n'a jamais vraiment décollé. J'y vois deux raisons:
  1. Il n'a aucun positionnement clair;
  2. Les Wikipédiens l'ont tuer (sic).
Premier point: le positionnement. Pour ce qui concerne les informations, je ne suis qu'un consommateur lambda, je vais là où elles sont faciles d'accès. Un bon article est pour moi bien écrit, un peu creusé, et présente des nouvelles fraîches. Et ah oui, il est gratuit à consulter. On peut argumenter de la qualité du travail journalistique qui laisse parfois, c'est une litote, à désirer, mais dans l'ensemble je reste assez satisfait des infos présentées quotidiennement sur les sites du Monde, du Temps ou du New York Times (et, plus rarement, d'autres canards de calibre similaire): les articles sont plutôt bien écrits, un peu creusés1, rapidement disponibles... et gratuits (ou partiellement gratuits - j'essaie juste de me tenir à jour de ce qui se passe grosso-modo, si je veux des détails j'achèterai un magazine ou ledit journal).

Un article de Wikinews est en comparaison gratuit, assez bien écrit, mais pas vraiment creusé ni très rapidement disponible. En gros, il faut d'abord que ses rédacteurs entendent ou lisent la nouvelle dans les médias généralistes (comme moi), en extraient à leur tour la substantifique moëlle, et publient l'article. Ah oui, et comme il n'y a que des volontaires et que, pour la version francophone on parle surtout d'une seule personne, il faut que Grondin ait le temps de s'en occuper2. Bref, pour faire court, faute de moyens Wikinews n'est pas vraiment compétitive et le consommateur final que je suis préfère aller voir la concurrence. Ou plutôt, quand Wikinews publie un article j'ai déjà lu les mêmes sources que son rédacteur: les nouvelles ne sont plus tant fraîches qu'un peu tièdasses.

Deuxième point, probablement le plus dommageable: Wikipédia étouffe tout simplement Wikinews. La distinction entre les deux n'étant pas claire, le contenu est globalement similaire. Une distinction claire, ce serait de donner le luxe du recul à l'encyclopédie, pour lui permettre de traiter les évènements significatifs. Par significatifs, j'entends ceux dont on aurait encore quelque chose à faire plusieurs semaines après qu'ils soient survenus (les élections, les attentats du 11 septembre, etc.) et pour lesquels une vision synthétique, contextualisée, est disponible. Le culte de l'immédiat serait gentiment redirigé vers Wikinews, et les dizaines de bonnes âmes tentées par le suivi en temps réel pourraient donner un coup de main là-bas. Après tout, quand il s'agit d'expression ou mots qui auraient toute leur place dans le Wiktionnaire, on fait moins de chichis. Mais parlez du Ponant ou de Jo le Plombier et soudain, c'est le drame.

Alors quoi? Il n'y a aucune volonté ou intérêt à aider les petits frères wikijournalistes: si c'était le cas, les microbandeaux wikinews ne seraient pas placés tout en bas de l'article wikipédien, mais tout en haut3. L'intégration de nouvelles sous forme d'articles "encyclopédiques" (qui ne sont que des resucées de dépêches ou articles d'agence sur n'importe quel évènement ayant fait plus de dix morts) semble par ailleurs un acquis sur Wikipédia - Wikinews, faute de contributeurs, n'a pas les moyens de proposer un contenu alternatif qui la démarque des grands médias.

La seule question qui reste est donc: quand la Fondation va-t-elle passer ce projet par pertes et profits?


1. Je parle ici des thématiques générales. Vu le traitement des infos liées à Wikipédia, je prends tout ce qui est un tant soit peu technique avec de grosses pincettes.
2. Bon, je suis injuste, d'après le serveur statistique ils seraient deux à présenter plus de 100 créations par mois. A la même époque l'an dernier, on en comptait 5.
3. Le plus révélateur, c'est que dans le texte "Wikinews propose des actualités sur XYZ", le lien wikinews pointe vers l'article... de Wikipédia sur Wikinews.

lundi 1 juin 2009

Troll du jour

Arnold Buzdygan est un troll. Ca n'est pas moi qui le dit, mais Wikipédia en polonais (et probablement tous ceux qui ont lu sa prose dans divers forums, on diraît). Le monsieur en a pris ombrage et a porté l'affaire devant les tribunaux fin 2007.

Il vient de perdre son procès. Et l'article polonais qui lui est dédié le traite toujours de troll.

Il y a aussi gagné une certaine notoriété:

Statistiques de fréquentation de l'article Arnold Buzdygan sur Wikipédia en polonais, mai 2009.


Ca me rappelle l'histoire du recordman du monde des procédures en justice: celui-ci vient d'intenter un procès au Guiness des records pour lui avoir attribué ce titre.